Maison du Souvenir

L'Echo de la Mémoire et de la Citoyenneté.

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L’ECHO de la MÉMOIRE et de la CITOYENNETÉ



LE MOT DE L'ÉCHEVINE



Oupeyennes, Oupeyens,

Après une organisation minimaliste des commémorations du 8 mai dernier en pleine période de confinement lors de la première vague de la pandémie, nous comptions réorganiser les commémorations du 102e anniversaire de l'Armistice en présence de classes de primaire de chaque entité et des Associations patriotiques, comme le veut la tradition.

De plus, dans le cadre d'un de nos projets citoyens, nous avons récemment rencontré des habitants de Hermée pour qu'ils choisissent avec nous une essence d'arbre à planter, en leur présence, sur la place du Carcan. La plantation était envisagée en marge des commémorations prévue le 10 novembre avec les écoles. Pour rappel, le hêtre qui se trouvait sur la place du Carcan depuis 200 ans a dû être abattu il y a quelques mois suite aux attaques du temps et d'un champignon parasite. Marqués par cette « disparition » du paysage, le Collège et les habitants du village avaient souhaité qu'un nouvel arbre soit replanté à cet endroit.

Malheureusement, l'évolution de la situation sanitaire et la prolongation des congés de Toussaint nous obligent à modifier nos projets, les regroupements de plus de 4 personnes n'étant plus autorisés. Cela ne nous empêchera pas de fleurir les monuments de chaque entité et de planter, à Hermée, ce nouvel arbre étant donné qu'il s'agit de la période la plus favorable à son adaptation dans un nouveau milieu. Mais cela devra donc se faire en petit comité.

Le Collège souhaitant toujours organiser une inauguration avec les habitants du village, nous reprogrammerons une rencontre, une cérémonie pour ce nouvel emblème de la place dont l'essence (voir dans ce supplément) a été sélectionnée par les habitants et le Collège. Dès que la situation sanitaire le permettra, nous ne manquerons évidemment pas de vous en informer.

                                                                                                  Cindy Caps

                                                               Echevine de la Citoyenneté et des Affaires patriotiques

Dans ce 2e Écho de la Mémoire et de la Citoyenneté, nous continuons à présenter les monuments dressés dans notre Commune en souvenir de la première guerre chez nous. Cette année, c'est le village de Hermée qui est mis à l'honneur.



Mais rappelons d'abord ce qui s'y est passé en août 1914 ! Le 5 août à 23 heures, des troupes allemandes qui étaient guidées par des civils réquisitionnés et comprenaient notamment les 30e, 8ge et 90e régiments d'infanterie, arrivèrent au hameau de Petit-Aaz. Des soldats se détachèrent de la colonne et allèrent frapper aux portes des maisons, réclamant à boire et disant : « Nous sommes des Anglais, vos frères. »

Les habitants, qui étaient déjà dans les caves en prévision d'une bataille, furent contraints de restaurer les soldats, dont la plupart voulaient payer ce qu'ils recevaient. Après deux heures de repos, les Allemands se remirent en route, empruntant tous les chemins de la commune débouchant vers le fort et installant des canons dans plusieurs endroits.

Vers 1 heure (le 6 août), le fort de Pontisse, auquel la présence de l'ennemi venait d'être signalée, commença à tirer. Quelques moments après éclata une fusillade à laquelle se mêlait sans cesse la voix du canon. Cette fusillade dura plusieurs heures.

Repoussés par les Belges et ayant perdu beaucoup d'hommes, les Allemands se replièrent vers 4 heures dans la commune de Hermée et se livrèrent à leurs instincts. Ils pillèrent toutes les maisons de la rue Large-Voie, y mirent le feu et massacrèrent plusieurs personnes: le vieux Ghaye fut retrouvé dans le corridor de sa maison, le corps troué de balles; son neveu, Ulric Ghaye, fut emmené dans une prairie et fusillé ; Joseph Lhoest et Antoine Rouvray subirent le même sort.

Les habitants qui se montraient dans les rues étaient accueillis par des coups de fusil. C'est ainsi que Jean Verdin, un vieillard de 82 ans, reçut une balle dans le ventre et expira après trois heures de souffrances horribles, sans qu'on pût lui porter secours.

Un groupe de villageois ayant voulu tenter de circonscrire l'incendie fut criblé de balles ; trois d'entre eux furent blessés : Frère reçut une balle à l'épaule, Asselings fut blessé à la jambe et le jeune Tasset fut atteint à la cuisse.

Mathieu Matray, qui n'avait pas, à leur gré, mis assez d'empressement à leur ouvrir sa porte, fut emmené et fusillé. Le père et le fils Humblet, ainsi qu'un nommé Meekers, qui se trouvait chez Humblet, furent aussi passés par les armes.

Plusieurs maisons, qui avaient été transformées en ambulances, étaient remplies de blessés allemands auxquels les habitants donnaient des soins.

Le vendredi 7 août, dans la matinée, une patrouille du 14e de Ligne belge vint désarmer les blessés, les déclarant prisonniers.

Le lendemain, quatre blessés moururent et, comme faute de pouvoir se rendre à Liège, les médicaments faisaient défaut, dix charretiers de la commune furent réquisitionnés pour transporter les blessés à Maastricht.

Les jours qui suivirent se passèrent dans l'angoisse. Des habitants abandonnèrent le village et se rendirent dans les communes voisines; ceux qui restèrent vécurent en proie à une terreur constante.

Le 12 au soir, des troupes allemandes d'infanterie et de cavalerie reparurent et s'installèrent dans les habitations.

Le 13, après la reddition du fort de Pontisse, le Bourgmestre fut emmené avec les troupes jusqu'à Fexhe. Il revint le lendemain, annonçant que le commandant lui avait déclaré que Hermée serait désormais en paix.

Mais le 14, vers 13 heures, des patrouilles d'uhlans commencèrent à circuler dans le village, ce qui inquiéta fort les habitants. Une heure après, la commune regorgeait de fantassins qui expulsèrent les gens de leurs maisons sans leur donner le temps d'emporter quoi que ce soit.

Quand tous les habitants furent réunis sur la place du Carcan, le major qui commandait les troupes obligea le curé, M. Paisse, à répéter ces paroles: « On a tué un de nos officiers. Nous ne savons pas si c'est à Hermée ou à Vivegnis. Nous allons commencer par punir la commune de Hermée. On va vous conduire dans la campagne et là, vous serez jugés. »

On fit alors observer au major que l'officier tué auquel il faisait allusion était peut-être au nombre des blessés morts à Hermée le 8 août à la suite des blessures reçues pendant l'attaque du fort de Pontisse. On lui raconta comment on avait transporté en Hollande les autres blessés allemands que l'on ne pouvait soigner et on lui soumit, à l'appui de ces dires, les attestations des postes militaires que les conducteurs avaient rencontrés pendant le trajet. Ces attestations démontraient la sollicitude des habitants de Hermée pour ces blessés.

« Oui, répondit le major, une erreur a peut-être été commise. Mais les ordres que j'ai reçus sont formels et je dois les exécuter. »

Avant d'emmener la population qui se composait de 450 personnes, hommes, femmes et enfants, le major ordonna aux hommes qui possédaient des armes d'aller les chercher et de les déposer sur la place de l'église. Il leur accorda pour cela un quart d'heure.

Tandis qu'il donnait ces instructions, des soldats pillaient aux alentours et le major pouvait parfaitement voir ses hommes pénétrer dans les maisons et en ressortir les bras chargés.

Quand les armes furent déposées sur la place, on emmena les 450 habitants en cortège, les mains en l'air, jusque sur la route de Milmort où on les massa dans une terre d'avoine. Tous ces malheureux pensaient qu'on allait les fusiller. On les laissa là plus pendant plus de deux heures, entourés de soldats.

Pendant ce temps, le village flambait et la fumée de l'incendie menaçait d'asphyxier les captifs. Personne n'était resté dans le village, car les Allemands avaient emporté les infirmes sur leur dos ou dans des brouettes.

Vers 18 heures, on força le triste cortège à se remettre en route. Il alla jusqu'à la gare de Milmort. Les prisonniers devaient toujours tenir les mains en l'air et, à tout instant, les soldats hurlaient : « Plus haut, les mains, plus haut ! »

Quand ils arrivèrent à l'endroit voulu, on les plaça derrière des canons qui tiraient sur les forts et ils restèrent là jusqu'à 21 heures. Enfin, on les libéra, mais on leur défendit de retourner dans la direction de Hermée. Presque tous logèrent à Milmort.

Le lendemain, plusieurs d'entre eux voulurent retourner dans leur village. A peine étaient-ils arrivés que les soldats les ligotaient et les emmenaient dans une prairie qu'ils appelaient « Chasse réservée ».

Le soir, on les conduisit à l'église où on les laissa jusqu'au lendemain matin, puis on leur rendit la liberté. Ce jour-là, un grand nombre d'habitants rentrèrent dans le village. Le spectacle était désolant. Plus de 150 maisons étaient détruites par le feu. Il ne restait debout que quelques maisons au Brou, à Petit-Aaz et à Grand-Aaz. Des chevaux, des vaches, des porcs étaient carbonisés dans les ruines. Partout, dans les coins, gisaient des bêtes crevées ou tuées à coups de baïonnette, et des charognes répandaient une odeur épouvantable. Les quelques bêtes qui avaient échappé vagabondaient. Les maisons qui n'étaient pas brûlées étaient saccagées.

Il fallait pourtant continuer à vivre. On chercha des abris, on installa trois ou quatre ménages dans la même maison et, petit à petit, on reprit la vie habituelle.



LE NOUVEL ARBRE DE LA PLACE DU CARCAN SYMBOLISERA LA CITOYENNETÉ

Le sens premier de citoyen est spécifiquement juridique et administratif: être bon citoyen, c'est respecter les lois de son pays. Aujourd'hui, être citoyen revêt une dimension bien plus large et relève davantage d'une attitude humaniste. De nos jours, être citoyen, c'est manifester de l'empathie à l'égard de l'autre, participer de manière constructive et positive à la vie de la communauté, à la préservation et l'amélioration de son milieu de vie.

Quel rapport, nous direz-vous, existe-t-il entre un citoyen et un arbre ? Il faut le trouver dans les innombrables services que les arbres ont rendus à la communauté des hommes depuis la nuit des temps. Nous n'envisageons pas ici le rôle essentiel des forêts pour les écosystèmes de notre planète. C'est l'arbre, en tant que sujet individuel, que nous voulons mettre à l'honneur, en rappelant ses diverses implications dans le quotidien des villageoises et villageois d'hier et d'aujourd'hui au fil des siècles.

La liste est longue de ces arbres remarquables, pour certains classés à l'inventaire du patrimoine de la Wallonie. Quelles fonctions pouvaient-ils remplir ? Énumérons-en quelques-unes. C'est d'abord l'arbre repère, remarqué aisément dans le paysage grâce à sa taille. Il s'apercevait de loin et guidait le voyageur égaré. L'arbre fut aussi borne, ancêtre de nos jalons modernes au même titre que rochers, ruisseaux, chemins, buissons. Ensemble, ils constituaient des tracés délimitant les cultures et les zones de pâturage et contribuaient de cette manière à éviter les contestations entre communautés. Les arbres à clous étaient des arbres guérisseurs. Un clou mis en contact avec la zone malade (abcès dentaire, furoncle) absorbait le mal. Il était ensuite planté dans l'arbre à clous qui, grâce à sa force vitale, supprimait le mal. Des arbres à clous existaient dans toute la Wallonie. Ils relèvent évidemment de la superstition. Mais qu'importe ! La foi en leur pouvoir contribuait, dans de nombreux cas, à soulager grâce à un effet psychosomatique bénéfique. On peut encore mesurer la dimension de cette foi au nombre de clous fichés dans les troncs: des milliers dans certains cas. La superstition ne doit évidemment pas masquer les effets thérapeutiques réels des végétaux. Rappelons simplement que bon nombre de remèdes à base de plantes ont été scientifiquement reconnus.

L'arbre protecteur nous ramène dans le domaine des croyances. L'arbre invoqué intercède auprès d'une divinité pour préserver une population de calamités, de maladies, un individu, une famille d'une mauvaise fortune. L'histoire nous rappelle que bon nombre de chapelles ont pris la place d'un arbre. D'autres ont été associés à des saints prestigieux comme l'arbre Saint-Roch à Oupeye. Saint Roch était invoqué lors d'épidémies.

L'arbre est aussi mémoire. Planté à l'occasion d'un évènement important, grâce à sa longévité, il perpétue le souvenir de cet évènement et de sa signification, bien au-delà d'une vie humaine. Il revêt ici un rôle didactique. Sa plantation est un acte particulièrement citoyen, dans la mesure où il s'agit d'un geste envisagé dans le long terme, à l'adresse des générations futures.

Enfin, l'arbre souvenir garde, gravée dans son écorce, la trace d'une promesse quand il ne devient pas un confident attentif. Et n'oublions pas. Bien que majestueux, il reste discret, au point que nous oublions de le remercier de nous abriter des rayons du soleil, de nous offrir des moments de fraîcheur.

C'est pour toutes ces raisons que nous planterons début novembre, sur la place du Carcan, un Tulipier de Virginie qui symbolisera l'importance que la Commune d'Oupeye et son Collège accordent à la Citoyenneté.

L'arbre Patrotet (Houtain), le Chêne d'Oupeye, l'arbre Saint-Roch (Oupeye) ont tous le profil d'un arbre remarquable, c'est-à-dire un arbre qui se remarquait de loin dans le paysage et qui pouvait servir de point de repère aux habitants, aux voyageurs.



Pourquoi avoir choisi une espèce exotique ? Une espèce est dite indigène lorsqu'elle est présente dans un écosystème sans intervention humaine. Ainsi, le chêne, le hêtre, le sorbier, par exemple, sont indigènes en Wallonie. Est exotique une espèce introduite dans un milieu par l'homme. Accueillir des espèces exotiques peut être bénéfique : ainsi la tomate, la pomme de terre sont toutes deux originaires d'Amérique du Sud. En choisissant de planter à Hermée une espèce exotique, symboliquement, nous soulignons que l'accueil de l'autre peut être source de bienfaits et d'enrichissements. L'accueil est un geste citoyen profitable à tous.



Fiche signalétique

Nom : Tulipier de Virginie (Liriodendron fulipifera)

Origine : Amérique du Nord – Âge moyen : 300 ans

Taille moyenne : 50 mètres – Feuillage caduc

Floraison : mai-juillet

 

 



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