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Le Belge le plus
décoré de la Seconde guerre mondiale fut le docteur Albert Guérisse, chef de
réseau. Docteur Albert Guérisse Albert Guérisse est né de
parents ardennais (Saint-Hubert) à Molenbeek en 1911.
Etudiant en médecine à Louvain, il se fait remarquer en démolissant à plusieurs
reprises la balustrade qu’avait fait mettre le recteur sur la façade de la
bibliothèque pour cacher une inscription évoquant « la fureur
teutonique » responsable, en août
1914, de sa destruction. Finalement expulsé de Louvain, Albert Guérisse va
achever ses études de médecine à l’ULB. Le 10 mai 1940, il exerce comme médecin militaire de carrière au 1er Régiment de Lanciers à
Spa. Le 28 mai, la capitulation est annoncée mais le jeune médecin décide de
continuer la lutte. Il se dirige alors vers la côte belge, s’embarque vers
l’Angleterre d’où il rejoint la France, à Sète, au bord de la Méditerranée. Albert Guérisse en mission secrète sur le H.M.S. Fidelity, est fait prisonnier Albert Guérisse se retrouve
finalement sur un bateau français le « Rhône » qui ayant déjà
effectué plusieurs missions secrètes rejoint l’Angleterre. L’équipage se met au
service de l’Intelligence Service et, sous le pavillon britannique,
devient le « H.M.S. Fidelity ». Le HM S Fidelity Le
30 décembre 1942, anonyme dans un grand convoi (ONS 154) qui fait route vers
Colombo, puis est destiné à l’Extrême-Orient, le HMS Fidelity
est attaqué et coulé à 16h30, par le sous-marin U 435 (cpt Siegfried Strelow) dans le nord des Açores par 43 23 N 27 07 W. Son
équipage était alors de 280 « marins » plus 51 « commandos de
Marine » et 4 auxiliaires. En plus il avait à son bord 44 survivants du
torpillage du « Empire Shackleton ». Les bilans diffèrent suivant les
sources, les historiens s'accordent sur 379 morts et disparus et 10 survivants.
Le destin épargna le Dr Guérisse qui, heureusement ne faisait plus partie de
l’équipage depuis avril 1941. Le navire sert à débarquer des agents en
France et à les rapatrier si nécessaire en Angleterre. Albert Guérisse va faire
partie de l’équipage sous le nom de Pat O’Leary. Il
est nommé Lieutenant Commander de la Royal Navy. On
lui donne une fausse nationalité canadienne qui expliquera sa faible
connaissance de l’anglais tout en cachant sa nationalité belge. Chargé d’une
mission ultrasecrète : embarquer 12 officiers polonais cachés par la
résistance française à Collioure, Pat O’Leary et deux
compagnons quittent le HMS Fidelity
en canot et rejoignent le petit port. Les Polonais sont en retard, le canot
attire l’attention des autorités portuaires qui préviennent la gendarmerie. Le
canot est rapidement arraisonnés par une vedette de la gendarmerie et ses trois
occupants sont arrêtés puis transférés dans la prison de Saint-Hippolyte-du-Fort
dans le Gard. Durant sa détention, Pat O’Leary prépara avec minutie son évasion. Il s’arrangea
pour fabriquer une clé permettant de pénétrer dans un petit local dont la
fenêtre donnait sur le chemin de ronde. Puis, avec l’aide de ses amis fit scier
patiemment un des barreaux de la fenêtre. Quand enfin vint l’heure de s’évader,
deux douzaines de prisonniers organisèrent une fausse tentative d’évasion dans
la cour afin de faire diversion et d’attirer en cet endroit tous les gardes.
Pat O’Leary ayant retrouvé sa liberté trouva un
premier abri dans une maison de retraite tenue par des religieuses. La Mère
Supérieure le cacha dans une malle du grenier qui contenait de vieux habits
sacerdotaux. Après que les gendarmes aient interrogé la Mère Supérieure, la
religieuse vint rechercher Pat et le fit échapper par un souterrain qui servait
autrefois à rentrer les récoltes de la vigne. Peu après, à Marseille, Pat
rentra en contact avec Yan (s’écrit aussi Ian) Garrow,
un Ecossais qui organisait des passages d’aviateurs alliés vers l’Angleterre
via Gibraltar. Yan Garrow Yan Garrow
était un survivant du 51e Highland qui, après Dunkerque, avait
continué sur la Somme, à St-Valery, une résistance désespérée. Yan demanda à
Pat de rester à Marseille pour le seconder. Celui-ci accepta, sous condition
que l’amirauté acceptât cette nouvelle mission et fut hébergé provisoirement
par le Dr Rodocanachi. Yan Garrow
envoya la demande destinée à l’amirauté britannique par radio. Il fallut
attendre pendant une semaine la réponse positive convenue émise sur la B.B.C de
Londres « Adolphe doit rester ». Pat O’Leary fut doté d’une nouvelle carte d’identité au
nom de « Joseph cartier ». Sa première mission consista à convoyer de
Marseille à Port-Vendres, via le train, le sergent pilote Philip Herbert.
Port-Vendres était situé à la frontière espagnole. Dans cette localité, le
jeune pilote fut confié à un guide pour franchir les Pyrénées. A partir d’août 41, Pat O’Leary organise aussi des évasions (plus de 50 !) à
partir de la prison de St-Hippolyte du fort. De juillet à octobre 41, c’est 75
militaires alliés qui parviennent à franchir les Pyrénées dont le Belge Alex Nitelet, de la 609e escadrille belge de la
R.A.F. Alex Nitelet
avait reçu une rafale de mitrailleuse qui avait crevé un de ses yeux. Il était
parvenu à atterrir dans le nord, près de Fauquenbergues.
Finalement, il fut confié au réseau d’évasion de Yan Garrow
via un de ses membres, l’abbé Carpentier d’Abbeville. Un évadé célèbre : Whitney Straight Whitney Straight Un évadé célèbre fut l’aviateur
Whitney Straight Cet homme d’origine américaine avait
été, durant de nombreuses années, champion de courses automobiles. Il était
aussi l’inventeur d’un avion qui porte son nom. Pendant la guerre, engagé comme pilote de la R.A.F., il essuya un tir meurtrier
en s’approchant de son objectif et parvint à grand peine à atterrir en rase
campagne. Il connut alors toute une série d’aventures. Son premier souci en
sortant indemne de son avion fut de se procurer un chapeau pour compléter sa
tenue composée de sa veste de cuir. Ce chapeau devait, selon lui, suffire
amplement pour passer inaperçu. Un fermier rencontré consentit à se
séparer de son couvre-chef et Whitney s’en alla, tout confiant, passer la nuit
dans une meule de foin d’une grange. Bien installé, quelle ne fut pas sa
surprise d’entendre, un peu plus tard, des soldats allemands rentrer dans la
grange et se coucher à proximité de lui ! Réveillé le premier, le pilote
contempla ses ennemis qui dormaient encore, épars dans la paille. Whitney
s’esquiva promptement et rejoignit la gare la plus proche pour s’embarquer dans
un train pour Paris. Il avait l’intention de trouver là
refuge à l’ambassade américaine mais un écriteau sur la porte mentionnait que
l’ambassade était fermée et que les requêtes devaient être adressées à
l’ambassade des Etats-Unis de Berlin. Néanmoins, un battant de la porte
s’ouvrit, ce qui permit au pilote de demander de l’aide au fonctionnaire qui
lui avait ouvert. Ce dernier lui demanda de s’éloigner le plus rapidement
possible car l’ambassade était surveillée et de communiquer par téléphone.
C’est ce que fit Straight dans le premier café rencontré. Quelques instants après son coup de
téléphone, on vint lui remettre une enveloppe contenant dix mille francs. Straight décida alors de rejoindre, à
Chenonceau, la Loire qui marquait à cet endroit à la ligne de démarcation.
Sportif, il n’eut aucun mal à franchit à la nage le fleuve, regagna une gare et
s’embarqua dans le premier train pour le sud. Entre Pau et la frontière, il y
eut un contrôle sévère des pièces d’identité. Straight ne possédait pas de
carte d’identité, mais s’en sortit par de longues explications exprimées dans
un excellent français. Straight préféra néanmoins, par sécurité, descendre du
train à la gare suivante. Il se réfugia alors dans un petit café où il commanda
un repas copieux. La méfiance de la patronne fut éveillée et, quelques instants
après, trois gendarmes vinrent l’arrêter. Incarcéré à Saint-Hippolyte-du-fort,
Straight était à peine là emprisonné de quelques jours qu’il tenta de s’évader
mais sans succès. C’est le docteur Rodocanachi qui le
sauva. Nous avons vu plus haut que ce médecin faisait partie du réseau
d’évasion Garrow et que c’est chez lui, à Marseille,
que Pat O’Leary avait d’abord été accueilli. Le
docteur faisait partie à ce moment d’une commission médicale déterminant
l’aptitude des prisonniers de guerre à reprendre les armes. Ceux qui étaient
déclarés inaptes étaient rapatriés car jugés inoffensifs. Le bon docteur (il
fut arrêté plus tard et périt hélas en Allemagne) trouva chez le pilote des
tympans en très mauvais état et un dos très mal arrangé. Whitney Straight fut
ainsi convié à un convoi de rapatriement vers l’Espagne. Malheureusement à Perpignan, le
gouvernement de Vichy, par représailles d’un bombardement, décida de retenir
les Britanniques qui furent placés en surveillance dans l’hôpital Pasteur de
Nice. Pat O’Leary alerté, prit contact avec son
collaborateur Francis Blanchain qui trouva en une
infirmière de l’hôpital, Nicole Brugère, une complice
idéale pour libérer le pilote. On fit parvenir à l’infirmière de puissants
somnifères qu’elle remis à Straight. Celui-ci les versa dans les verres de ses
gardiens avec qui il jouait aux cartes. Les gardiens commencèrent à somnoler. Straight et
l’Anglais qui partageait sa chambre, après avoir rapidement revêtu les
vêtements civils que leur avait amenés l’infirmière, s’élancèrent et s’échappèrent de la chambre après avoir forcé
la serrure. Accueilli à l’extérieur par des membres du réseau qui leur
fournirent de nouvelles identités, Straight et son compagnon de chambre furent
cachés dans un appartement de Juan-les-Pins pendant trois semaines. Enfin, un
soir de septembre 1942, les deux évadés furent embarqués sur un navire venus
spécialement de Gibraltar pour les rapatrier. Yan Garrow est fait prisonnier Le réseau connut cependant un échec en
perdant un des pilotes confiés à Paul Cole. Pat O’Leary
ressentit de la méfiance pour cet homme et enquêta sur lui. Pour se faire, il
procéda à des interrogatoires dans le nord où il opérait. Il s’enquit de sa
réputation chez tous les membres du réseau qui avait eu affaire à lui et revint
à Marseille avec la conviction que cet homme était un traitre. Dès son arrivée,
en octobre 1941 on l’avertit que Yan Garrow venait de
se faire arrêter et interné à Mauzac (Dordogne). Albert Guérisse succède à Yan Garrow Pat fit amener Paul Cole près de lui. Il
disposait avec lui de deux hommes de
confiance. Les trois hommes interrogèrent Cole mais rien ne prouvait avec
certitude la trahison de l’intéressé. Pat décida alors de l’enfermer dans la
salle de bain, le temps de réfléchir au sort qu’il devait lui réserver. Mais
Cole s’échappa par la fenêtre et ne fut pas rattrapé. Pat O’Leary
entrepris alors de voyager pour prévenir tous les membres du réseau de la
dangerosité du traitre. C’est lors de cette mission qu’il poussa une pointe vers
la Belgique et qu’il put revoir, le temps d’une soirée, ses parents qui
devaient être tranquillisés sur son sort. Malheureusement cela n’empêcha pas l’arrestation
de l’abbé Carpentier et de deux autres agents. Pat repartit une nouvelle fois vers
la France occupée pour alarmer à nouveau le réseau, combler les vides et resserrer
les mailles de son organisation. Il s’établit ensuite quelques temps à Paris
pour y renforcer son réseau, cela avec
l’aide de son ami Jean de la Olla. A nouveau, le réseau connut un déboire
important quand un déserteur allemand demanda la collaboration du réseau pour
se mettre à l’abri. Pat décida qu’il fallait l’aider malgré sa nationalité.
Malheureusement, le déserteur et son passeur furent malheureusement arrêtés à
Nevers. Il s’en suivit l’arrestation de six membres du secteur de Calais ! Pat O’Leary se rend à Gibraltar Début 1942, Pat à son tour, passa les
Pyrénées et se rendit à Gibraltar. Pour passer la frontière, il se cacha dans
la malle fermée à clé se trouvant dans le coffre d’une grosse voiture. Dans le
centre de Gibraltar, il fut reçu par « Colle de poisson » le chef du M.I.9.
Pat venait demander d’urgence qu’on lui fournisse un opérateur-radio
muni de son matériel. Trois semaines plus tard, Jimmy Langley
arriva par avion d’Angleterre. Cet officier amputé de l’avant-bras gauche lors
des premiers combats, désirait en savoir plus sur le réseau et lui amenait
aussi l’opérateur-radio promis, un Belge du nom de Ferrière ainsi que son
matériel. Ferrière et Pat furent ensuite reconduits par bateau en France sur
une plage proche de Canet. Malheureusement Ferrière ne convenait pas, il était
arrivé en France uniquement pour se rapprocher de sa femme qui y était réfugiée
et tremblait de peur continuellement. Pat s’arrangea pour renvoyer en Angleterre
la mauvaise recrue accompagnée de sa femme. Finalement un nouvel opérateur
radio fut trouvé sur place et « Roger » établit alors la première
liaison radio avec Londres. Un nouvel arrivant de Londres survint aussi en
renfort comme opérateur radio, il s’agissait du pilote borgne, le belge Alex Nitelet que le réseau avait fait échapper auparavant.
Alex Nitelet, déclaré inapte, avait voulu continuer
le combat avec celui qui l’avait sauvé des griffes de l’ennemi. Il allait
effectivement rendre de nombreux services au réseau avant d’être remplacé par un
autre opérateur radio, le Tom Groome, lui aussi Belge. Pat aux prises avec un agent ennemi Décidément Pat n’arrêtait jamais. Un jour,
un jeune homme qui disait s’appeler François Dulais
déclara détenir des renseignements capitaux pour le réseau. Il s’agissait en
fait d’un agent allemand. Pat partit avec lui « en mission » dans la
montagne. Là, il fut confronté à de rudes maquisards espagnols qui confirmèrent
qu’il était un traitre. Pat voulait user de clémence mais il pensa aux dégâts
qu’avait causés précédemment Paul Cole et il revit en pensée les corps torturés
de l’abbé Carpentier. Il permit finalement aux rudes maquisards espagnols d’éliminer
le traitre. Le réseau cache et évacue quarante hommes en une fois Roger, l’opérateur-radio fut arrêté mais
cela n’empêcha pas le réseau d’effectuer sa plus grande opération, l’évacuation
de près d’une quarantaine de personnes dans six embarcations par mer. Parmi
eux, le « squadron-leader » Frederick Higginson et quatre de ses comparses,
heureux d’avoir réussi leur évasion du fort de la Revère
et qui trouvèrent un hébergement dans les appartements de Louis Nouveau et du
docteur Rodocanachi. Frederick Higginson Parmi eux aussi, 34 sous-officiers de la
R.A.F. échappés aussi du même fort après avoir descellé des pierres d’une paroi
qui les séparait de la partie inoccupée du fort. Il fallut organiser une
extraordinaire maintenance pour nourrir et cacher tous ces hommes jusqu’au jour
où les colis furent convoyés jusqu’à Canet-Plage, dans une villa, pour y attendre les bateaux de la
délivrance ! Ceux-ci apparurent enfin le 12 septembre 1942. Pat o’Leary, à la recherche
d’argent, se rend en Suisse au Consulat d’Angleterre Pat demanda à Louis Nouveau d’assumer
son intérim et pris le train pour Lyon. Là, le consul d’Amérique lui indiqua la
manière de rejoindre la Suisse en contactant le curé de Saint-Julien à la
frontière. Ce qui fut fait. Le curé lui indiqua une brèche dans le réseau de
fils barbelés. Pat s’y glissa mais une volée de balles imprévues transforma son
escapade en parcours de combattant. Sain et sauf, parvenu en Suisse, il se
rendit alors au consulat britannique où il rencontra Monsieur Farell qui lui promit d’envoyer, à Lyon, par un agent, la
somme d’un million. On ne sait pas ce qu’il advint de cette fortune mais elle ne
parvint jamais à Lyon ! Ligne Pat O’Leary Pat O’Leary
délivre Garrow de sa prison, puis Gaston Nègre En février 1942, Albert Guérisse,
alias Pat O’Leary, alias Adolphe Cartier parvient à
faire évader Yan Garrow du camp de Meauzac. Il fallut trouver un agent pénitentiaire à la
fibre patriotique puis aller chez lui pour le convaincre de collaborer à l’évasion.
L’agent pénitentiaire se dénommait « Pierre ». Pat O’Leary se rendit à son domicile à Sarlat pour régler les
détails de l’évasion. Pat fit ensuite travailler son tailleur de Toulouse
pendant une nuit entière afin de confectionner en urgence un uniforme de
gendarme. Les autorités de Vichy venaient en effet de remplacer les gardiens
des portes de la prison par des pandores et cela, juste quelques heures avant le
moment prévu pour l’évasion… On rajouta à l’uniforme de faux papiers et un
revolver de service. Grâce à cet uniforme que Pierre lui fait parvenir, Garrow put, accompagné de Pierre, sortir sans encombre de
la prison. L’évadé fut ensuite caché par Marie-Louise Dissard
à Toulouse avant d’être convoyé en Espagne. L’évasion de Gaston Nègre ; Pat
mène des fugitifs au-delà des Pyrénées sans passeur Un autre
compagnon de Pat, Gaston Nègre, se trouvait incarcéré à Castres. Cette fois
c’est Marie-Louise Dissart qui trouva un gardien,
Robert, qui voulait rejoindre l’Angleterre. Ce dernier organisa une fête
d’anniversaire pendant laquelle il versa un somnifère préparé par le Dr Rodocanachi dans les verres de ses confrères. Les trois
compères s’endormirent en jouant aux cartes et Robert s’en alla ouvrir la
cellule de Gaston Nègre, profitant au passage de libérer quelques autres
soldats et pilotes. Dehors, un camion de déménagement rempli à ras bord les
attendait. Huit hommes se faufilèrent dans une grande boite à jouets. Un peu
plus loin, le camion se fit arrêter et contrôler. Un gendarme vérifia le
contenu du camion, déplaça une table, et des chaises mais ce fut tout. Gaston
fut mis à l’abri à Paris tandis que les autres fugitifs firent partie d’un
convoi de 24 personnes conduit par Pat vers l’Espagne. Repérés sur
un train, les hommes sautèrent tous hors de celui-ci lorsque le train ralenti à
l’approche de la gare de Banyuls. Six hommes manquaient à l’appel mais les
rescapés se remirent en marche pour le lieu de rendez-vous avec le passeur.
Celui-ci ne vint pas. Finalement après 24 heures d’attente, par petits groupes
les fugitifs rejoignirent Canet. Parmi les manquants se trouvaient Robert qui
avait aidé à l’évasion de Gaston Nègre. Il devait mourir plus tard sous la
torture ! A Canet, Pat décida de
franchir les Pyrénées sans passeur. Sa
traversée, dans la neige et le blizzard, dura trois fois plus que d’habitude
mais réussit ! Une série d’arrestations suite à
la traitrise d’un nouveau traitre : Roger le Neveu En janvier
1943, le belge Tom Groome qui envoyait des messages
radio à Paris pour le réseau est surpris dans une chambre d’hôtel par des
membres de la Gestapo. Il parvint à sauter par la fenêtre et par miracle
survécut à sa chute. Il se cacha dans une proche maison mais fut découvert. Il
fut ensuite contraint par les Allemands de continuer à envoyer des messages
vers Londres. Mais Tom Groome avait signalé qu’un de
ses messages encodé sans aucune faute, signifiait qu’il était trahi. Grâce à
cela Tom Groome poursuivit ce jeu de dupes pendant
plusieurs semaines puis la Gestapo se lassa et Tom fut déporté en Allemagne. Une deuxième
alerte survint quand Jean de la Olla,
escortant cinq « colis », fut interpellé par un contrôle douanier. Il
put s’échapper de justesse tandis que les « colis » étaient
malheureusement pris. Une troisième alerte concernait Roger Le Neveu, nouvelle
recrue du réseau. Cet ancien légionnaire accomplit sa première mission parfaitement
mais lors de la seconde il revint affolé, ses colis australiens arrêtés !
Une troisième mission fut confiée à Roger Le Neveu : convoyer cinq pilotes
américains à la gare d’Austerlitz et les remettre à Louis Nouveau. Mais à la
gare, on exigea des voyageurs une fiche d’admission délivrée à un guichet
spécial. Louis et les américains furent surpris de la rapidité avec laquelle
Roger Le Neveu parvint, en dix minutes, à se faire délivrer les fiches. Les
fugitifs purent alors grimper dans leur train mais ils eurent durant leur
voyage une seconde surprise, celle de voir la police pénétrer dans leur wagon
et les arrêter ! Roger Le
Neveu n’arrêta pas là son action néfaste ! Après
l’arrestation de Louis Nouveau vinrent celle d’Alex Wattelebed
(nommé par ses amis « Jacques »), de Jean de la Olla et de Norbert Fillerin
le 5 mars 1943. Ces hommes furent torturés. Jean de la Olla, à Fresnes, fut fouetté et devait garder des
cicatrices pendant sept mois. Il fut interrogé de nombreuses fois, notamment
après des douches d’eau glacées ou avec une chaîne autour du cou à laquelle on
tirait dans plusieurs directions. Les yeux dévorés de fièvre, amaigri, Jean de
la Olla résista jour après jour à ces séances de
torture. Il récitait l’Ave Maria sous les coups et entre deux tortures
s’agenouillait pour prier. Un matin on sortit les hommes méconnaissables pour
les confronter entre eux. Mais cette confrontation ne mena à rien. Alors une
dernière séance de torture commença à 8 heures du soir. Alex tint jusque 3
heures du matin, Norbert jusqu’à 5 heures et Jean jusque dix heures. Les
bourreaux eux aussi étaient à bout. Nous vous donnons une dernière chance
dirent-ils : « Parlez ou on vous tue ». Tous les trois
refusèrent de parler. Le 22/01/1944, ils furent déportés. Ils iront à Flossenburg puis au Kommando de Hradisshko au sud de Prague. Ils seront libérés le dernier
jour : le 08 Mai 1945. L’arrestation de Pat O’Leary Pat O’Leary ne connaissait pas encore l’arrestation de ses
trois agents opérant dans le nord quand son ami Paul Ulmann
lui demanda d’assister à un rendez-vous demandé par Roger Le Neveu dans un bar
de Toulouse. Ce dernier était soit disant descendu du nord pour révéler au chef
des informations sur l’arrestation de Louis Nouveau. A peine assis à la table
où s’était installé Roger, deux Allemands se ruèrent sur eux et les arrêtèrent.
Ils furent interrogés au Q.G. de la Gestapo. Contre le mur, les mains sur la
tête, Pat aperçut par une porte entrouverte, Roger Le Neveu, assis dans la
pièce voisine et bavardant et fumant avec des Allemands. Il ne faisait plus
aucun doute sur la traitrise de Roger. Pat avoua alors son statut d’officier
britannique ce qui n’empêchèrent pas les policiers de le rouer de coups. L’un
d’entre eux maintenait ses bras en arrière tandis que le second frappait le
visage… Pour finir il s’écroula et se retrouva dans une cellule où 20
prisonniers misérables gisaient. Paul Ulmann était
près de lui. Le pauvre homme s’attendait au pire parce qu’il était juif. Les
deux hommes échangèrent quelques phrases puis sombrèrent dans un sommeil coupé
de cauchemars. Le matin, l’interrogatoire recommença pour Pat qui, habilement aiguilla
les policiers sur un certain monsieur Benoit, personnage issu de son
imagination et qu’il devait normalement rencontrer au buffet du bar de la Frégate.
Les Allemands y enquêtèrent mais revinrent bredouille et les interrogatoires
musclés reprirent pour Pat. Lors de l’un d’entre eux, il s’évanouit et quand il
reprit connaissance, il s’aperçut grelottant, ligoté dans… un frigo ! Il
se prépara à mourir et crut devenir fou. L’agonie fut interrompue brutalement ;
on vint au dernier moment le sortir pour le mettre dans un bureau à côté d’un
radiateur brûlant. On le força à boire du cognac mais Pat ne révéla rien de
nouveau à ses bourreaux. Alors, à nouveau, ces derniers remirent Pat dans le réfrigérateur
pour le préparer à une nouvelle séance d’interrogatoire. Celle-ci se révéla
toujours sans résultats, Pat se retrouva, cette fois seul, dans une cellule sur
une poignée de paille. Le lendemain, on le transféra à Marseille au Siège de la
Gestapo où il fut interrogé encore durant trois jours. Pat expliqua longuement
que l’organisation était si cloisonnée qu’il ne connaissait pas l’identité de
ses compagnons du réseau. Pat expliqua qu’il y avait un agent pour la radio, un
autre pour les finances, un autre responsables des guides espagnols mais qu’il était
impossible de les rencontrer à nouveau car ils connaissaient son arrestation.
En effet, son absence à 3 rendez-vous consécutifs devait avoir alerté tous les
agents. Finalement,
Pat, en sa qualité d’officier britannique, fut remis dans les mains de l’Abwehr aux mains plus douces que celles de la Gestapo qui
l’enferma pour plusieurs mois dans la prison de Fresnes. Pat, dans cette prison, put
communiquer par les conduits d’air avec plusieurs autres notamment avec Pierre d’Harcourt et avec
l’aviateur américain Ball. Un jour, il aperçut, par un petit trou creusé qu’il
avait patiemment creusé avec un clou dans l’encadrement de sa fenêtre, son très
grand ami et collaborateur Louis Nouveau passant dans le couloir. Il fallait
qu’il rentre en communication avec lui car Pat avait appris que l’épouse de
Louis, de son nom de guerre « Marquisette »,
avait pu rejoindre Londres. Pat guetta alors toutes les apparitions de Louis
devant sa cellule et un jour Louis surgit. Pat posa sa bouche contre le trou et
cria. « Marquisette est bien arrivée à Londres ». On imagine aisément
la joie de Louis Nouveau de savoir sa femme en
sécurité. Après de longues semaines, Pat est
transféré en Allemagne à Sarrebruck. Il y est battu par un SS Heinrich Hornetz pour avoir pris la défense d’un Anglais. Une
consolation il retrouve là son compatriote « radio » Tom Groome. Monthausen, Natzweiler puis Dachau suivirent. Epouvantables moments dont nous
reparlerons plus loin ! Marie-Louise Dissard succède à Pat O’Leary sous le nom de « Françoise » En France, une femme extraordinaire
reprend la direction du réseau d’évasion. Il s’agit de Marie Louise Disssard née à Cahors. Cette femme est une véritable
artiste dans le domaine de la confection. Elle a travaillé longtemps comme
professeur de couture tout en essayant de convaincre les jeunes femmes de leurs
talents qui égalent ceux des hommes. Cela ne l’empêche pas d’avoir un côté
léger puisqu’elle tiendra un magasin de lingerie à Toulouse qu’elle nommera « A la poupée moderne ». Elle a 59 ans
en 1940. Avec le pseudonyme de « Victoire », elle participe
rapidement au réseau Bertaux, l’un des premiers
groupes de résistance toulousains. Elle diffuse des tracts clandestins, récolte
des renseignements pour les résistants. Mais la police française démantèle le
réseau en décembre 1941 et tous ses membres sont enfermés à la prison militaire
de Furgole. «
Victoire » se débrouille alors pour ravitailler toutes les semaines ses
camarades emprisonnés. Au printemps 1942 elle rencontre Pat O’Leary
qui recherche des contacts sûrs dans le Sud-ouest de
la France. Il comprend rapidement la valeur de Marie-Louise Dissard
pour ses qualités d’organisatrice et lui accorde toute sa confiance. En juin
1942, sous le pseudonyme de «Françoise », elle organise les transits des pilotes de la R.A.F. par
Toulouse. De jour comme de nuit, infatigable, elle s’occupe de la réception, de
l’hébergement, du camouflage (c’était une spécialiste du déguisement) et du
convoyage des aviateurs. Quand Pat O’ Leary
est arrêté « Françoise » rejoint sa ville natale, Cahors, puis déterminée à
reprendre son action patriotique, retourne à Toulouse. Le War
Office, persuadé que cette filière d’évasion est anéantie a suspendu tous les
financements et toutes les opérations. « Françoise » se rend alors en
Suisse pour convaincre l’ambassadeur britannique, de lui permettre de réactiver le réseau. Marie-Louise Dissard décorée en 1947 « officier de l’Ordre de l’Empire Britannique » Convaincus, les Anglais lui donnent les
moyens nécessaires à la remise en place du réseau Pat O’Leary
qui devint le « Réseau Françoise » en mai 1943. L’on
doit donc à Marie-Louise Dissard la survie d’un
réseau d’évasion très précieux. Surveillée par la Gestapo, « Françoise »
vivra cachée dans des greniers, des garages ou des caves d’où elle dirige les
actions. Ancienne couturière, elle use de tous les déguisements pour passer
inaperçue. C’est un jour en veuve éplorée, en paysanne, ou en femme du
monde qu’elle accompagnera ses « colis » à travers les rues de Toulouse
jusqu’aux quais de la gare Matabiau et même jusqu’en
Espagne. A l’insu de Londres, elle utilise aussi les filières d’évasion pour
les résistants français à l’insu des Anglais. Pat O’Leary devient Président du
Comité international des Prisonniers de Dachau Transféré à Mauthausen, Pat souffre de
la Gale et est hospitalisé au revier (infirmerie) du
camp. Il est effaré de voir les soins qui y sont donnés par des médecins
polonais qui ne disposaient que de bandages en papier et des comprimés
d’aspirine. Un Kapo allemand y faisait régner l’ordre. Cet homme apparemment
paisible pouvait frapper à mort un malade sans perdre un instant le contrôle de
ses nerfs. Il exerçait surtout ses ravages sur les détenus exténués qui souillaient
leurs paillasses. Il les empoignait une ou deux fois par jour pour les mener
dehors et les asperger d’eau froide tout en les étrillant à la brosse. Privés
de nourriture, glacés, ces incontinents mouraient ordinairement avant le
sixième jour. Pat appris là aussi comment on faisait mourir les prisonniers
trop âgés pour travailler. On les hospitalisait au revier
et ils recevaient une injection mortelle d’huile de moteur. A sa sortie du revier, Pat travailla dans les carrières comme un forçat.
Il se refroidit et souffrit d’une pneumonie qu’il cacha de nombreux jours pour ne pas retourner
au revier. Avec seulement 40 kilos et 40° de
température, il avançait, taillait, portait et survécut à sa pneumonie, animé
d’une invincible force. C’est à Monthausen que Pat apprit que le traitre Paul Cole avait
trouvé refuge à Berlin. Vers la fin de septembre 44, Pat quitta
Mauthausen pour Natzweiler. Tom Groome
l’accompagnait et souffrait de la typhoïde. Il rencontra dans le camp un
médecin belge qu’il avait côtoyé durant
ses études et nommé Boogaerts. Le Dr Boogaerts transféra Tom à l’infirmerie et pris Pat comme
infirmier. Pat veilla sur Tom et le soutient à l’aide de soupe de lait en
veillant à ce qu’il ne mange aucun aliment solide afin de faire reposer les
intestins. Au printemps, l’ordre arriva
de quitter Natzweiller pour Dachau. Pendant 24
heures, les détenus voyagèrent dans des wagons où l’air manquait et où il
fallait veiller à empêcher tout mouvement de panique parmi les détenus. A Dachau, PatO’Leary
continua à cacher sa qualité de médecin mais se dévoue comme infirmier dans
l’infirmerie du camp ainsi que Tom Groome et John Hopper.
Ce dernier était ingénieur et habitait Paris. Avec une froide détermination, il
avait décidé de descendre chaque homme de la Gestapo qu’il rencontrait. Il
disposait de deux révolvers et tirait remarquablement bien des deux mains. Un
jour les Allemands mirent sa tête à prix. Alors qu’il était assis dans un café accompagné
de sa femme, il fut reconnu. Hopper saisit ses armes et fit feu mais les
policiers étaient en nombre. Hopper vit sa compagne grièvement blessée et
décida de … l’achever pour lui éviter les tortures. Comment les Allemands
l’avaient-ils épargné ? Pat se le
demandait. Pat rencontrera aussi dans l’infirmerie
Arthur Haulot. Tous ces hommes durent faire face à
une terrible épidémie de typhus. Le camp ressemblait à un camp de pestiférés.
Pendant un mois, on releva jusqu’à 50 décès par jour puis petit à petit, le
nombre de décès diminua. Une vue intérieure d’une chambre de block en 1945 Dans l’immense camp (4) qui comptait, à la date du 26 avril 1945,
environ trente mille détenus (à ce nombre, il faut ajouter les prisonniers des Kommandos extérieurs au nombre de 37.000), des comités
d’entraide se sont créés par nationalité. Ces comités vont se fédérer en un
« Comité international de Dachau » (International Prisoner
Committe). Son rôle est important. Il faut en effet à
tout prix que la libération de trente mille prisonniers ne se passe pas dans
l’anarchie et selon la loi du plus fort. Les rapatriements, les soins médicaux,
la logistique pour approvisionner les ex-prisonniers doivent être soigneusement
organisés. Pat O’Leary, dont
la vraie nationalité est toujours cachée, montre ici une nouvelle fois son
charisme, son talent de meneur d’hommes car il devient le président du comité
International. Evidemment, on le croit Canadien, officier britannique. Arthur Haulot est nommé quant à lui vice-président (2). Rétrospectivement, dans
ce camp d’horreur, quel honneur pour les
Belges d’avoir pu accéder à ces fonctions de « sages ». Grâce au
« Comité International » créé par les prisonniers de Dachau, de
nombreuses vies seront sauvées. Dans le livre du général Paul Berben (1) consacré à Dachau, quelques informations sont
données quant à l’action de ce comité. Nous y apprenons que ce sont les
communistes allemands, les premiers occupants du camp, qui formèrent le premier
noyau de résistance. Peu à peu se formèrent des groupes nationaux qui
essayèrent de se coordonner entre eux. C’est ainsi que par des membres de la
direction du groupe allemand, fut établie une liaison avec les groupes
soviétiques et yougoslaves en 1942. L’aide aux camarades constitua la forme
la plus tangible de la résistance. En 1940, le groupe allemand, via les
travailleurs de l’ « Effecktenkammer » détourna des milliers de Reichmark
pour aider de nombreux invalides qui arrivaient des camps de Flossenburg, Sachenhausen,
Mauthausen et Nuengamme. Avec cet argent, ils purent faire quelques
achats à la cantine pour améliorer leur situation. Les SS eurent vent de l’affaire
et les membres de l’ « Effectenkammer »
furent mis au bunker où ils subirent le châtiment du « Bock » et du
« Pfahl ». Le « Bock » consistait
à recevoir 25 ou 30 coups de nerfs de bœuf sur une table concave. Le prisonnier
devait lui-même compter à haute voix les coups ;
s’il n’y parvenait pas, ou se trompait, on recommençait à zéro. Quant au
« Pfahl », la peine du poteau, elle consistait à être suspendu
par les poignets à une chaîne fixée à un poteau de 2M50 de haut. Le prisonnier
restait suspendu pendant une heure ou deux sans aucun appui. La chute provoquée
à la fin de la peine provoquait des ruptures d’articulations et les hommes ne
pouvaient plus se servir de leurs bras pendant des semaines. L’aide de l’extérieur était difficile à
obtenir mais le Comité international obtenait parfois certains résultats. A
mentionner l’intervention du curé-doyen de Munich, Dr Emil Muhler
qui, avec l’appui du cardinal Faulhaber et du
curé-doyen de Dachau, Pflanzelt, collecta de l’argent
qui fut introduit par des ouvriers civils travaillant pour des entreprises occupées
à des travaux au camp. Le comité veilla aussi à défendre la communauté contre
les dénonciateurs. Ainsi il fut interdit de parler au nommé Baldes.
Les SS réagirent en enfermant de nombreux détenus mais ces représailles
restèrent sans effets. Un travail très dangereux était aussi accompli par
nombre de capos dans les kommandos, par des
secrétaires et des infirmiers pour arracher des détenus des griffes de la
Gestapo en les cachant au « Revier » et en
les transférant ensuite dans des kommandos appropriés.
D’audacieuses substitutions furent faites pour sauver des hommes en danger en
les faisant passer pour morts. L’idée fut émise par Pat. Le premier sauvé fut un
russe le N° 14.307. Condamné à être fusillé, on échangea son identité avec un
moribond. Haulot suggéra de généraliser la formule.
D’autre part, durant une nuit, trois hommes du comité acculèrent le « Lagerschreiber » - détenu faisant office de
secrétaire du camp. Dans son bureau étaient centralisés tous les renseignements
au sujet des détenus du camp et des kommandos
extérieurs. Etait assisté par plusieurs détenus secrétaires, interprètes et
estafettes rapportant les documents au Rapportfuhrer,
le responsable allemand du rapport journalier - à suspendre l’organisation
des convois de prisonniers devant sortir de Dachau pour y être mitraillés selon les nouveaux
ordres de Berlin. Sous peine d’un terrible châtiment à la délivrance du camp
par les alliés, cet homme accepta. Grâce à cela, plus de 5.000 déportés furent
sauvés. Pour entretenir le moral, le comité
international organisait des activités culturelles, sportives. La musique et le
chant rendirent à maint détenu un peu de courage et d’espoir. Le général Paul Berben
dans son livre (1) raconte un évènement très parlant à propos de cette résistance : Lors
de la fameuse exécution des 92 officiers soviétiques se plaça un incident
témoignant de l'esprit de solidarité régnant dans le camp. On avait appris le 3
septembre 1944 que cette exécution devait avoir lieu le lendemain. Le comité
décida qu'aucun kommando de travail ne sortirait ce
jour-là. Au matin du 4 septembre, au signal « Formez les kommandos
de travail » personne ne bougea. Ceci était nouveau pour les SS et le signal
fut répété, mais sans résultat. Le « Schutzhaftlaqerführer
» menaça de faire ouvrir le feu des mitrailleuses des tours de garde.
Entretemps deux compagnies de SS étaient arrivées. Quelque 22.000 détenus se
trouvaient rassemblés et un véritable massacre était inévitable. Alors le
lieutenant-colonel Tarasow, un des condamnés, invita
les détenus à se rendre au travail : « Sortez, camarades. cria-t-il, nous
mourrons comme nous avons vécu, en luttant pour l'URSS ! Adieu, camarades,
sortez ». Ses camarades et lui-même allèrent à la mort afin que des milliers d’autres
aient la vie sauve. (…) Le
sabotage constituait une des activités primordiales de la résistance dans le
camp. Une action importante de cette nature fut entreprise à l’occasion de la
construction du crématoire, dénommé par les SS « Baracke
X ». Le kommando qui devait faire ce travail fut
invité par la direction politique clandestine à le saboter dès le premier coup
de pelle. II fallait empêcher l'utilisation de main-d'œuvre qualifiée, retarder
la livraison des matériaux et exploiter les divergences qu'on savait exister
entre le kommando de construction SS et la direction
SS du camp. Le kommando des détenus, dont le capo
était Karl Wagner, de Stuttgart, parvint à faire trainer le travail de façon
telle que le délai d'achèvement, fixé à trois mois, ne fut pas respecté. (Paul Berben, Dachau page 201) Il en fut de même pour la chambre à gaz
qui ne fut jamais prête parce que le kommando
« Montages et réparations » parvint à remplacer trois caisses de
matériel en bronze nécessaire à l’installation. Au sein des groupes nationaux,
toutes les occasions étaient bonnes pour prouver par des actions collectives,
l’esprit de résistance. Le 14 juillet 44, au rassemblement, les Français débouchèrent
des blocks en rangs martiaux. Lorsqu’il apparut que la libération des
camps était proche, les comités constituèrent des groupes de combat et des groupes
de sécurité. Il fallait que le comité international fut en mesure de tenir le
camp fermement et en même temps qu’il puisse s’opposer à toute action des SS. Le 28 avril 1945, Les SS préparaient
leur départ. 15 hommes de nationalités réunis au block 24 discutèrent alors de
tous les problèmes du camp et décidèrent de se constituer officiellement Comité International. Ce comité eut bien du
travail lors de la libération de leur camp, le lendemain. Dès
le lendemain de la libération, le 30 avril, le Comité International des détenus
tint sa première séance (3) en présence du commandant américain. La protection
extérieure du camp était assurée par les Américains, l'autorité supérieure du
camp étant exercée par le Comité international sous la présidence du major Pat
0’Leary avec comme vice-président le général Michailow (URSS) et Arthur Haulot
(Belgique). Le doyen du camp, Oskar Müller, et Jan Domagala
étaient les organes d’exécutions. Immédiatement furent élus les membres des
commissions indispensables telles que celles de l'alimentation, du service de
santé, de la désinfection, des questions disciplinaires. Le Comité
international était le représentant de tous les groupes nationaux. Ceux-ci
avaient constitué déjà avant la libération leurs directions clandestines et
aussitôt celles-ci déployèrent une activité ininterrompue pour enregistrer
leurs nationaux, préparer le rapatriement, établir la cause des décès, informer
constamment leur groupe de tout ce qui pouvait les intéresser, etc. Chaque
groupe national publia dans sa langue un bulletin donnant les renseignements
les plus récents au sujet de la situation politique et militaire générale et,
dans la mesure du possible, de la situation de son pays, ainsi que les mesures
prises dans l'intérêt de la vie du camp. Arthur Haulot On
s'efforça également de procurer aux libérés des distractions variées, si
nécessaires après ces années de tension nerveuse, en organisant des concerts,
des manifestations sportives, des fêtes. Le Comité international décida que le 1er
mai serait fêté comme « Jour de la Libération ». En 48 heures – on
travailla même encore toute la nuit du 30 avril au 1er mai – une
grande estrade fut fabriquée, les drapeaux nationaux hissés et le camp tout
entier mis en ordre aussi bien que possible. Au matin
de ce 1er mai 1945, « ceux de Dachau », groupés par nations,
marchèrent drapeaux en tête, une dernière fois vers la place d'appel, en hommes
libres cette fois, et assistèrent à une cérémonie grandiose et inoubliable.
Dans l‘allégresse générale les morts n'étaient pas oubliés, et d'émouvantes
cérémonies furent organisées en leur honneur. Leur nombre s'accroissait
malheureusement encore : journellement des hommes mouraient encore à Dachau,
dans le camp libéré. Durant le mois de mai il en succomba 2.226 et du 1er
au 16 juin encore près de 200I. Le nombre des malades était très élevé : le 15
mai, il se trouvait dans les hôpitaux n° 1 et n° 2 respectivement 386 et 3.804
patients. Enfin, le
12 mai la quarantaine fut levée et le lendemain un premier contingent composé
de Belges quitta le camp en camions. Les départs se succédèrent alors
rapidement et environ un mois après la libération les opérations de
rapatriement étaient achevées. Elles avaient soulevé bien des problèmes
épineux, par exemple pour les groupes qui pour des raisons politiques se
trouvaient dans l'impossibilité de rentrer dans leur pays et qui durent être
pris en charge par d'autres nations après de laborieuses négociations. (Paul Berben, Dachau, pages 229 et 230) Les mois passèrent, un jour, on appela
Pat à Paris pour une identification d’un cadavre à la morgue. C’était Paul
Cole. A la libération, Paul Cole avait quitté Berlin pour se faufilé dans les
lignes américaines où il se présenta comme agent britannique évadé d’un camp
ennemi. Il réussit à se faire affecter à la section US de « recouvrement
d’Art ». Il fut doté d’une automobile et conduisit les Américains d’une
cachette à une autre. Après avoir servi les anglais, les Français, les
Allemands, il avait trouvé des nouveaux maîtres. Il se trahit lui-même en
voulant renouer avec une de ses amies d’autrefois. Peter Hope agent du M.I.5
vint l’arrêter au QG de l’armée américaine. Il fut enfermé au
« Cherche-midi » mais réussit après plusieurs semaines à s’échapper.
Un mois plus tard, un garçon de café dénonça à la police un homme au
comportement bizarre qui vivait dans son établissement. La police consentit à
une visite dans la chambre de l’intéressé et fut reçue par un homme qui
n’hésita pas à sortir son révolver et à tirer sur un des deux policiers. Son
compagnon abattit Cole de deux balles. Plus de trente hommes du réseau Pat O’Leary avaient succombé à cause de cet homme. Quant à Roger Le Neveu, à en croire
Gaston Nègre, qui le tenait de maquisards, il aurait été pris et tué par ces derniers. Albert Guérisse, à nouveau volontaire, cette fois pour servir
en Corée Le 28 avril, le camp est libéré. Revenu
à Londres, Albert Guérisse est décoré de la George Cross, la plus haute distinction
britannique après la Victoria Cross. Rentré en Belgique, Guérisse reprend du
service dans l’armée belge et est affecté à l’hôpital militaire de Bruxelles.
Quand la Guerre de Corée éclate, il est major-médecin dans son régiment du 1er
Lanciers à Spa. La Belgique envoie des volontaires en Corée et Albert les
rejoint en 1951. Pendant 13 mois, il assurera le
commandement du service médical pour les Belges en s’illustrant en allant même
chercher au péril de sa vie un soldat blessé entre les lignes. Rentré en
Belgique, il sera nommé Général-Médecin et deviendra le patron du Service de
Santé de l’armée jusqu’en 1970. Le Roi l’anoblit « comte » en 1986. Le nombre de ses décorations est
impressionnant. Il fut le Belge le plus décoré de la Seconde Guerre mondiale
(35 décorations). Le vaillant docteur
mourut au printemps 1989. Il avait, par modestie, demandé de n’avertir la
presse de son décès qu’après son enterrement car il ne souhaitait pas trop de bruit autour
d’un homme « qui avait simplement fait son devoir ». La maison de la famille Guérisse à Spa Notes : 1) Paul Berben, Dachau, 1935-1945, L’histoire officielle, 325
pages, édités en 1976 par le Comité International de Dachau, 65, rue de Haerne, 1040 Bruxelles. 2) Composition
du Comité International de Dachau : 3) Compte-rendu de la première séance du
Comité international de Dachau du 30 avril 1945, de 20 h. 30 à 22 h. 30 1. La séance eut lieu en présence du Commandant
américain. Lt Colonel Fellenz.
4) Plan
du camp de concentration de Dachau Le premier camp de concentration allemand fut ouvert le 22 mars 1933 dans une usine à explosifs désaffectée, située a proximité de Dachau. Adversaires politiques, Juifs, prêtres et éléments «indésirables» devaient y être isolés en tant qu'ennemis de l'état national-socialiste. En 1937, le camp prévu pour 5000 personnes s'avéra insuffisant. Les détenus furent alors utilisés à construire un camp plus vaste, terminé en 1938. 1) Le camp comprenait de part et d'autre de l'allée principale, (Lagerstrase) bordée d'arbres plantés par les détenus Biographie sur Albert Guérisse : 1. Marcel JULLIAN. H.M.S. Fidelity, bateau mystère, Bibliothèque Amiot-Dumont, 1956. 2. Vincent BROME, préfacé par Pierre Mac Orlan de l’académie Goncourt, L’histoire de Pat O’Leary, Le Livre contemporain Amiot-Dumont, 1957 » Dr P. Loodts
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